Intervention de Françoise Grolet lors du conseil de communauté de Metz Métropole à propos du « Plan Pluriannuel d’Investissement » le 4 avril 2016.
Le vote de ce nouveau Programme Prévisionnel d’Investissements (PPI) pour 2016-2020 arrive opportunément le même jour que le vote du Budget 2016 – …et quel budget ! – En effet, il éclaire bien les choix que vous opérez en matière d’investissement, et leurs conséquences budgétaires.
On ne reviendra pas sur le très cher bus Mettis… mais comment ne pas évoquer le hasardeux Palais des Congrès (encore 8,125 M€), le très coûteux et mal conçu à Metz plan de conteneurisation des ordures ménagères (24,5 M€), ou le bétonnage effréné de Metz soutenu par l’agglomération ? Pour la ZAC Amphithéâtre, 11M€, + 3,2 M€ de « participation supplémentaire au déficit » et 9 M€ en avance de trésorerie, recouvrable après 2020… si tout va bien !
Alors oui, nous doutons. Il suffit de sortir du Pompidou, pour tomber encore et toujours sur le grand panneau rouge À LOUER au rez-de-chaussée de la Caisse d’Epargne, toujours désespérément vide depuis sa création, et ce n’est pas le seul dans la zone ! Une question : envisagez-vous de masquer ce symbole de votre échec, le temps de la visite de Manuel Valls jeudi ?
S’agissant de cette ZAC de l’Amphithéâtre, le « pari audacieux » qu’annonce le rapport nous semble plutôt un pari dangereux ; Muse, ses 120 commerces, son multiplexe, vont concurrencer un centre-ville déjà en difficulté : face aux emplois créés, combien d’emplois détruits ? Tout cela a un coût public, même si la municipalité socialiste ne met en avant que les financements privés. Même interrogation concernant les 13 000 m2 de bureaux derrière la gare : pouvez-vous nous informer dans le cadre de ce PPI (Plan Pluriannuel d’investissement), sur votre projet d’acheter un siège pour Metz-Métropole ? Peut-on savoir quand et où ?
Attention, il est important de comprendre que nous ne plaidons aucunement pour le passéisme ou le sur-place pour notre agglomération, dont il est urgent d’améliorer l’ attractivité. Mais où sont, dans les projets cités, les 44 communes qui composent Metz-Métropole ? Quel développement économique pour elles, quand tant d’argent est concentré à Metz, avec un maire qui réclame ensuite que les autres utilisent ces structures, car elles ont un coût ?
Il nous paraît d’abord primordial d’entretenir le patrimoine bâti de Metz-Métropole : les économies mal ciblées peuvent être contre-productives, notamment quand on rabote les budgets de surveillance remplacée par des caméras (voir ce qui s’est produit à la Maison de l’archéologie et du patrimoine).
L’agglomération a également un patrimoine foncier à valoriser, ce qui devrait concentrer tous nos efforts :
- l’exploitation du Mont St Quentin, avec son beau potentiel de développement touristique, qui avance enfin, mais à vitesse réduite,
- le plateau de Frescaty, dont le projet reste à préciser et à articuler avec le tissu existant, dont on aimerait mesurer l’implication. Il ne faudrait pas, en lançant cet « agrobiopole », déstabiliser ou concurrencer les maraîchers et agriculteurs locaux, qui sont déjà sur la corde raide.
Quant aux projets nouveaux, le seul critère de jugement sur ces investissements doit être : ces projets vont-ils générer de l’activité ? Les chantiers vont-ils produire des emplois durables, ou maintenir un mouvement artificiel ?
Je pense notamment au fait que le BTP tourne avec un recours croissant aux travailleurs détachés : au dernier conseil municipal de Metz, une élue a demandé de veiller à ce qu’il n’y ait pas sur le chantier du Palais des Congrès de travailleurs détachés non déclarés. Mais comment ne voyez-vous pas que même ceux des travailleurs détachés qui sont employés légalement nuisent au marché de l’emploi ici, chez nous, coûtant 30 à 40% moins cher qu’un intérimaire français ? Ce dumping social promu par l’Union européenne, fondé sur des salariés low cost vulnérables, crée une concurrence déloyale avec les entreprises locales choisissant d’embaucher local.
La politique de l’habitat, autre volet important du PPI (10,1 M€) connaît les mêmes dérives. Et je note un problème supplémentaire : dans les grandes villes où la vacance immobilière devrait vous préoccuper, le Programme local d’habitat (PLH) dépasse les objectifs que vous avez fixés de « production de logements », alors que ce même plan bride les petites communes dans leur développement. (Objectif de 1000 logements neufs/an, 1136 réalisés, dont 469 à Metz, 225 à Woippy, 80 à Montigny les Metz).
Voir tourner des grues dans le ciel de Metz ne suffit donc pas à nous convaincre, surtout quand les investissements portent sur des structures nouvelles dont le fonctionnement pèsera sur notre budget. On le verra peut être, si la conjoncture n’est pas aussi prometteuse que vous l’assurez, avec le Palais des Congrès, dont on paye déjà la promotion à la place du délégataire, comme c’était annoncé avant le vote…
Nous avons déjà à gérer un nouvel équipement voué à l’attractivité, le Centre Pompidou Metz, et on se rend compte des difficultés et coûts générés par une mauvaise maîtrise du projet à la base.
Je finirai en évoquant TCRM Blida : on nous a confirmé la volonté de Metz-Métropole d’intervenir uniquement sur le volet innovation/développement numérique du projet, en laissant à la ville de Metz la charge de financer sa Nuit blanche perpétuelle.
Oui mais… cela ne me rassure qu’à moitié puisque l’agglomération est (52%) et reste (36%) le premier actionnaire de la SEM Metz-Technopole, laquelle achète le site (3M€), et l’aménagera via une société SAS en cours de création. Or, on a appris en commission – et le PPI est totalement muet sur cette évolution – que le projet initial d’aménagement chiffré à 2 M€ est révisé à 8 M€ ! La SAS devra donc emprunter au total 8,5 M€, et on tente de nous rassurer en disant « si des banques cofinancent, c’est que le projet est sérieux ». Juste une remarque : dans leur lettre d’intention au Maire de Metz du 24 février dernier, les banques partenaires écrivent : « nous avons bien noté la volonté commune des actionnaires publics (Metz et Metz-Métropole) de garantir à 50% la dette de 8,5 M€ sur 20 ans contractée par la SAS ». Dette réalisée auprès de qui, au fait ?! Des banques !
Donc, le risque financier est bien réel, alors que les loyers qui doivent équilibrer ce plan de financement sont en grande partie virtuels. Vous avez annoncé un pôle média avec Mirabelle TV, mais là encore, Metz-Métropole s’engage financièrement, puisqu’il a été annoncé que nous entrerons au capital de la TV départementale. De plus, est ce que l’argent des contribuables doit servir au financement d’un media, que devient sa liberté éditoriale, nous ne sommes pas du tout d’accord !
Encore une fois, nous soutenons totalement l’ambition numérique et d’innovation de TCRM Blida, outil utile aux entrepreneurs du secteur, qui apporte une belle visibilité (avec Lor’NTech) et vitalité à notre territoire. Mais le mélange des genres et l’envolée financière du projet, dont le Républicain Lorrain notait le « montage acrobatique », nous laissent très réservés.
C’est bien représentatif, finalement, du sentiment mitigé que nous inspirent les équilibres, voire les déséquilibres, de ce Plan d’investissements.
Présidente du groupe FN au Conseil municipal de Metz
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